Utilité du panier au pâturage : entre culpabilité, regard sociétal et bénéfice pour l’équidé

La saison de pâturage est commencée depuis plus d’un mois et avec elle des dizaines de questions quotidiennes sur l’utilité d’un panier au pâturage pour éviter les risques de fourbure.

 

Cet article est là pour vous accompagner dans votre prise de décision car elle est loin d’être facile à prendre.

 

1- Panier ou pas panier ?

Afin de vous décider il est d’abord primordial de connaître les enjeux de santé liés à votre cheval.

Embonpoint léger

Votre équidé n’a pas maigri cet hiver, il démarre donc sa période de pâturage avec des kilos en trop. S’il n’a pas de problèmes au niveau des pieds (élastose), pas de dépôts de gras localisés (chignon, arrière de la queue et de l’épaule), il est encore temps de l’aider à s’affiner par le travail, en réduisant les quantités d’herbe accessibles (pâturage au fil par exemple), et en adaptant sa complémentation en minéraux, oligos et vitamines. Le panier peut encore être évité dans cette situation.

Embonpoint élevé et risque SME/Cushing

Dans ce cas précis la gestion de l’équidé va être plus contraignante. Il faut à minima éviter l’accès à l’herbe pendant la saison de pâturage et augmenter les séances de travail. Quand l’accès à l’herbe ne peut pas être supprimé (pension, vie en troupeau) alors effectivement le choix du panier peut s’imposer. Cela permettra à l’équidé de poursuivre sa vie en troupeau. Mais cela passe aussi par un temps d’adaptation comportemental car le panier modifie certaines perceptions et comportements. Un équidé vivant isolé des autres sera plus stressé qu’un équidé avec panier.

Fourbure 

Dans la phase inflammatoire, l’équidé est douloureux, il ne se déplace quasiment plus et il est urgent de le sortir de la prairie afin de procéder aux soins, et d’empêcher l’afflux massif de sucres qui vont aggraver la fourbure. L’équidé peut être mis au foin à volonté trempé 2h dans l’eau afin de réduire les niveaux de sucres. Passée cette phase inflammatoire et la phase de réhabilitation, une remise à l’herbe peut être envisagée mais cette fois-ci avec panier.

 

 

 

2- Sur quels critères le choisir ?

Dans les premiers critères de choix il y a forcément au départ le prix, le confort d’utilisation, le risque, la solidité, et le type de matériau utilisé.

Prix : entre 30 et 150 € selon les marques. 

 

Points de vigilance à observer :

- Le panier sera en contact avec la bouche en permanence avec des risques d’ingestion de matières. Surtout vérifiez bien que les matériaux utilisés sont agréés alimentaires. Attention aux produits peu chers, souvent Made in china qui utilisent notamment des caoutchoucs basiques sans aucun agrément. Les objets en caoutchouc au contact des denrées alimentaires sont utilisés pour des durées de contact relativement courtes. Néanmoins ils peuvent être à l’origine de contamination des denrées par des substances chimiques. Privilégiez les résines ou les plastiques alimentaires.

- Les paniers et/ou licols doivent pouvoir casser en cas d’accroche. C’est un préalable nécessaire pour la sécurité de votre équidé. 

- Risque de blessures de contact : selon les modèles, les frottements des licols, des paniers ou des attaches peuvent créer des zones plus fragiles. Bien protéger les peaux sensibles par des matériaux doux type néoprène, peau de mouton.

- Restriction comportementale. Attention au comportement de bâillement, de grooming qui peuvent être limités avec un panier qui serre et enveloppe trop le bout de nez.

- Le confort : il n’y a pas de marque idéale de panier. Il y a juste la marque qui convient à votre cheval. Dans tous les cas le panier doit être confortable à porter. Vous pouvez observer les réactions de votre cheval pour bien statuer sur une bonne utilisation.

- Respiration : le panier ne doit pas compromettre la qualité de respiration et la capacité du cheval à sentir les odeurs.

- Risque d’usure des dents. Tous les matériaux utilisés pour les paniers sont tous plus tendres que la structure dentaire. Cependant, en fonction du passé du cheval, de son âge, de la qualité de sa pulpe dentaire, une usure prématurée peut être constatée. Elle trouve son origine dans :

  • Un mauvais réglage du panier : caractéristique d’une usure sur un côté des dents plus qu’un autre (devant ou sur les côtés)
  • De l’herbe trop rase qui frustre le cheval qui n’arrive pas à l’attraper (pas d’herbe en dessous de 3 cm)
  • La présence de terre ou de petits cailloux qui rentrent à l’intérieur du panier : le nettoyer très souvent.
  • Une pulpe dentaire affaiblie : dans ce cas privilégier des fonds de paniers souples

Tout ce qui restreint trop les mouvements de mâchoires doit être évité. Un cheval fait 50 000 coups de mâchoires/jour ce qui montre bien à quel point manger est important pour lui.

Un temps d’adaptation est nécessaire et celui-ci peut varier en fonction des individus. Normalement un cheval met de quelques minutes à quelques heures à comprendre comment fonctionne un panier. Si au bout de 48h il reste prostré sans bouger, changez de modèle de panier. La forme et la souplesse peuvent être perçus de manière différente selon les chevaux.

 

3- Quand l’utiliser ?

Les périodes à risque sont le printemps et l’automne pour tous les chevaux sujets à l’embonpoint et le panier devra à minima être porté pendant ces phases-là.

Un panier se porte H24 si le cheval est en pâture H24. Sans panier un cheval mange en 3 h l’équivalent de 0.8% de son poids vif soit 4 kg de Matière Sèche pour un cheval de 500 kg (½ à 1/3 des recommandations pour un cheval au régime).

Une étude de 2011 (« Effect of wearing a grazing muzzle on pasture dry matter intake by poines ») a montré qu’un orifice de 2 cm baissait la consommation de Matière Sèche de 85% ce qui est trop restrictif.

- Paniers avec un orifice : viser minimum 3-5 cm pour avoir une baisse de 50 à 70% d’ingestion 

- Paniers avec grille: 50 à 70% de baisse d’ingestion selon les modèles

Pour les chevaux fourbus/SME/Cushing, le port du panier se fera parfois sur 3 saisons d’affilée en fonction de la pousse de l’herbe et de sa concentration en sucres.

Dans tous les cas observez bien le comportement de votre cheval. Lui seul aura la réponse à vos questions.

 

4- Comment expliquer son utilité à son entourage ?

Comment faire comprendre aux gens que le panier est là pour éviter des accidents métaboliques ?

En général les réactions du public en voyant un cheval avec panier sont toujours anthropomorphiques :

« Vous aimeriez que l’on vous fasse la même chose ? »

« Est-ce que vous mettez une grille sur vos frites pour en manger moins ? »

« C’est de la torture ! »

Même si certains utilisent des paniers par facilité, la plupart du temps c’est avant tout une situation de détresse qui déclenche son utilisation. La culpabilité arrive donc vite au galop. On se dit que l’on aurait pu réagir avant, que c’est de notre faute si notre équidé souffre, qu’il ne va pas comprendre.

La culpabilité ne sert à rien sauf à créer un stress qui se reportera sur votre animal.

Dans la plupart des cas le panier sauve la vie du cheval, il ne faut pas l’oublier. Le temps d’analyser sa situation, de savoir si l’on peut proposer un autre mode de vie, le temps de passer le cap d’une pathologie, il vaut mieux un panier qu’un isolement social de l’équidé.

Et pour l’entourage il suffit d’expliquer que votre cheval risque d’être diabétique et qu’il est impossible de lui demander d’arrêter de manger du sucre (comme un humain raisonnable pourrait le faire) et que le panier permet de contrôler ce niveau de sucre et ainsi maîtriser les pics d’insuline. Et que la fourbure, c’est comme la crise de goutte chez l’humain, c’est extrêmement douloureux. Le cheval doit pouvoir rester en contact avec ses congénères pour ne pas stresser, et bouger à loisir. Seul le panier permet cela (outre les équipistes et Paddock Paradise).

 

Dernier point : vous êtes votre meilleur conseiller donc faites confiance à vos intuitions. Ce sont souvent les meilleures pour votre cheval.